Services d’eau et d’assainissement : en route vers la transition écologique.

«  Des sujets qui étaient annexes sont désormais au cœur du cahier des charges et de la prestation attendue, et font l’objet d’indicateurs de performance précis ».

Interview de Yannick Ratte, Directeur général adjoint, Veolia Eau France

  • Quel changement observez-vous dans la prise en compte dans la commande publique des enjeux liés à la transition écologique, au développement économique et à l’inclusion sociale? 

Les attentes de nos clients publics sur ces sujets sont de plus en plus importantes, notamment dans le domaine de la transition écologique. Il y a eu une prise de conscience relativement rapide des Français sur ce sujet ; 74% d’entre eux[1] expriment désormais une inquiétude vis-à-vis des risques climatiques et écologiques. La sécheresse dans de nombreuses régions de France, la crise du Covid-19, les incendies estivaux ou la crainte de manquer de matières premières ou d’énergie suite à la guerre en Ukraine sont autant de sujets qui ont accéléré la prise de conscience sur la rareté des ressources, le défi climatique, la dépollution ou la biodiversité. Sans surprise, ces sujets sont également montés en puissance au sein des collectivités territoriales.

Ceci est d’autant plus vrai que la météo des derniers mois a permis de mesurer les impacts du changement climatique au niveau local. Chez Veolia, nous avons d’ailleurs un outil cartographique qui permet de visualiser les projections sur l’état des ressources en eau territoire par territoire, et permet ainsi de sensibiliser les élus sur l’impact dans leurs communes.

  • Comment se traduit cette prise de conscience dans les appels d’offre eau/assainissement ?

Traditionnellement, les cahiers des charges dans les appels d’offres portaient sur l’exploitation des services des eaux, avec à la fin un paragraphe qui demandait aux opérateurs de faire des propositions en matière de RSE.

Cette façon d’adresser la question est aujourd’hui un peu dépassée. De plus en plus, les collectivités publiques placent au cœur de la description des prestations des indicateurs de performance qui vont dans le sens de la responsabilité sociale et environnementale. Par exemple, nous devons gérer le service avec un engagement sur l’amélioration du rendement de réseau ; nous devons exploiter une station d’épuration en optimisant la consommation d’énergie voire en utilisant la surface autour pour installer des installations photovoltaïques ; nous devons assurer la relation usager pour la facturation et le recouvrement mais aussi faire de la pédagogie sur les économies d’eau. Ces sujets qui étaient parfois annexes sont au cœur de la prestation, et font l’objet d’indicateurs de performance précis.

Cette tendance s’accélère, avec néanmoins une certaine hétérogénéité selon les collectivités. Celles qui sont le plus en avance sur ces sujets n’hésitent pas à pousser très loin les curseurs des engagements avec des indicateurs ambitieux sur la consommation d’énergie, le rendement de réseau, la valorisation des sous-produits des stations d’épuration par exemple. Elles laissent souvent les entreprises proposer des innovations et se lancent dans des démarches de sourcing pour affiner leurs cahiers des charges. Il arrive aussi parfois qu’on observe un décalage entre les ambitions affichées et la réalité, avec des critères de notation peu adaptés et un critère prix qui reprend le dessus sur les autres dimensions.

Quels types d’innovations les opérateurs sont-ils en mesure de proposer ?

Pour proposer les meilleures innovations, il faut que la collectivité ait un vrai projet, une stratégie bien définie, et une volonté de se projeter dans les enjeux d’avenir du territoire. Les collectivités qui portent une vision ambitieuse et s’investissent sur ces sujets nouveaux font le pari qu’elles seront gagnantes sur le long terme. Et elles ont raison d’anticiper sur un sujet aussi vital que l’eau.

Nous pouvons alors apporter des solutions adaptées. Il s’agit par exemple d’innovations techniques, comme la réutilisation des eaux usées, un sujet sur lequel nous avons beaucoup avancé ces dernières années, ou encore l’utilisation de capteurs pour détecter les fuites, la récupération de la chaleur des réseaux d’assainissement pour chauffer une piscine. Mais il ne faut pas oublier les innovations économiques, qui doivent permettre d’évoluer vers des modèles plus vertueux en matière de protection de la ressource. Par exemple, la facturation de l’eau au m3 ne tient pas compte des enjeux de sobriété, il faut repenser le modèle. Nous accompagnons les collectivités sur tous ces sujets. Nous sommes dans une logique transformative, notre ambition est bien d’accompagner nos clients dans la transformation écologique.

Comment travaillez-vous avec l’écosystème local ?

Dans ce domaine, notre entreprise est pro-active. Quand on opère des services d’eau et d’assainissement, on couvre un spectre de métiers assez large, des activités sur le réseau à la relation client. Tous ces emplois sont des emplois locaux.

Par ailleurs, nous cherchons systématiquement à travailler avec l’écosystème local, que ce soit pour trouver des partenaires ou des fournisseurs. Nous nouons souvent des partenariats avec des start-ups locales, car un certain nombre d’innovations faites récemment trouvent leur application dans le secteur de l’eau, par exemple dans le domaine des biotechnologies, des capteurs ou de l’intelligence artificielle.

Pour tester ces innovations et ces nouveaux modèles, les villes de taille moyenne présentent une véritable agilité ; elles ont véritablement la capacité d’expérimenter, d’être avant-gardiste et faire progresser les sujets.


[1] Sondage : Baromètre de la Transformation Écologique – Elabe – Veolia – Septembre 2022

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