Promouvoir le développement durable dans les contrats : le point de vue de l’Assistant à Maitrise d’Ouvrage (AMO)

L’AMO a pour mission de conseilleur la collectivité publique, en amont et tout au long du projet, sur les aspects administratifs, techniques et financiers, que ce soit en raison de la complexité du projet, ou bien en raison de certaines compétences qui lui manqueraient.

Quel regard portez vous sur l’évolution de la commande publique vers un outil plus politique au service d’ambitions sociétales et environnementales ? que va changer la loi climat et résilience ?

La loi climat et résilience va étendre l’obligation d’adopter un SPASER à de nouveaux acheteurs publics, renforce leur publicité et leur contenu notamment en ce qu’il devra contenir des indicateurs précis.

Le SPASER est l’expression de la volonté politique de l’acheteur public en matière de développement durable. Ce document devrait être étudié avec attention par les candidats à la commande publique afin de pouvoir anticiper les évolutions des marchés publics et des concessions en matière sociale et environnementale.

Philippe PONS © Vinciane Lebrun/Voyez-Vous

Parmi d’autres mesures applicables à la commande publique, la loi climat et résilience prévoit également une extension, voire une généralisation, des spécifications techniques et des critères d’attribution environnementaux. L’enjeu ici sera de définir des spécifications et des critères adaptés à chaque segment d’achat pour éviter une « politique du chiffre » qui conduirait à de nombreux marchés « clausés » sans réel impact du point de vue environnemental et social. Les AMO peuvent aider les maîtres d’ouvrage à bien définir ces clauses et critères au regard de leurs objectifs des en matière sociale et environnementale et adaptés aux spécificités des secteurs concernés, En outre, au travers des projets qu’ils conçoivent, les maîtres d’œuvre sont en position idéale pour véhiculer ces ambitions : le levier est d’autant plus grand s’ils sont principalement jugés sur la haute qualité sociale et environnementale des projets qu’ils conçoivent

En quoi les services industriels et commerciaux (gestion de l’eau, déchets, restauration…) se prêtent-elle particulièrement à la mise en œuvre d’objectifs plus larges ? (durée des contrats, ancrage territorial du service…)

Les contrats globaux pour ce genre de service ont l’avantage de pouvoir comporter des objectifs plus larges que la gestion du service public stricto sensu. Cela peut se traduire, par exemple, par des clauses de performance sur la qualité de service ou en matière environnementale ou encore par un intéressement aux économies qui pourraient être réalisées.

Christophe MERIENNE

De ce point de vue, des véhicules juridiques récents peuvent se montrer intéressants.  Comme la concession « globale » ou « multi-objets » qui permet de confier à un même opérateur la gestion de différents services publics qui sont généralement segmentés alors qu’ils peuvent concourir ensemble à la mise en œuvre d’une même politique publique. C’est le cas des transports par exemple, où le besoin est de plus en plus marqué par l’usage multimodal, ce qui nécessite une coordination des services publics concernés. Les SEM à objet unique ou SEMOP sont également intéressante pour associer le public et le privé dans un équilibre que choisira la personne publique tout en bénéficiant des capacités et savoir-faire des entreprises privées.

Il faut bien noter que plus le contrat est global et de longue durée, plus sa phase préparatoire est importante pour bien maitriser l’opération : à cet égard, il est fondamental de préserver la mission du maître d’œuvre dans toutes ses composantes, et dans la limite des responsabilités qu’il est en mesure d’assumer, par exemple via la définition d’ensembles techniques fixant le cadre d’intervention de chaque acteur de ces marchés globaux. A noter que, le sourcing désormais consacré par le nouveau droit de la commande publique peut s’avérer très utile. Pour le choix du mode de dévolution, pour la préparation des consultations et des opérations de sourcing, les AMO sont également qualifiés pour accompagner les personnes publiques.

Quels outils se prêtent particulièrement à la prise en compte du développement durable dans les contrats ? (clauses sociales environnementales ? outils pour l’innovation type variantes, procédures négociées, cahiers des charges fonctionnels ? )

Tous les outils peuvent se révéler utiles selon la situation et les objectifs. Il ne faut pas oublier dans cette liste celui des critères de choix.

Les marchés globaux de performance peuvent être efficaces en ce qu’ils font dépendre une partie de la rémunération du titulaire de l’atteinte de performances fixées par le contrat. L’AMO peut aider à définir ces critères de performance chiffrés et à les évaluer en cours de contrat.

Concernant les clauses sociales, il est important d’associer les facilitateurs et ne pas hésiter non plus à se rapprocher des fédérations professionnelles pour savoir quelles sont les bonnes pratiques sectorielles. Les procédures négociées devraient permettre un dialogue sur le volume horaire demandé et les conséquences en cas de non atteinte malgré les efforts réels du titulaire. Il existe des alternatives à l’application de pénalités. Il ne faut pas non plus négliger le caractère vertueux des clauses incitatives, qui sont le mieux à même de favoriser les stratégies gagnant-gagnant.

Le recours aux variantes peut effectivement permettre l’émergence de solutions innovantes en matière de développement durable ou autre d’ailleurs. Il est important bien définir les conditions d’ouverture aux variantes en définissant avec soin les exigences minimales et les modalités de présentation afin de pouvoir les analyser convenablement et de s’assurer qu’elles répondent au besoin. Il est nécessaire également de limiter le nombre de variantes admises afin de ne pas être submergé d’offres à analyser. Si l’outil est intéressant et peut favoriser l’innovation, il nécessite d’être utilisé avec un minimum de précaution.

Quels conseils donneriez vous aux collectivités pour faire de leurs contrats passés avec les opérateurs des leviers pour le développement social et environnemental du territoire ?

Il faut utiliser les souplesses offertes par le nouveau Code de la commande publique, au premier rang desquelles les clauses de réexamen qui permettent des modifications des marchés publics en cours d’exécution. Cette souplesse peut permettre de conclure des avenants pour réorienter si nécessaires les marchés publics ou les concessions.

Lorsque cela ne contrevient pas aux règles de la commande publique, il est intéressant de favoriser les entreprises implantées localement. Économiquement, cela bénéficiera davantage au territoire, idem en termes d’emploi local et, dans certain cas, l’impact environnemental sera moindre si on considère les déplacements par exemple.

Il convient aussi de faciliter l’accès à la commande publique des TPE et PME. S’agissant des marchés globaux, il faut rappeler l’obligation de réserver une part minimale si le titulaire n’est pas lui-même une PME. Elle est fixée à 10% du montant prévisionnel du marché.

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Comment faire des services publics locaux des leviers pour la transition écologique et l’inclusion sociale dans les territoires ? Comment mieux leur permettre de contribuer aux ambitions sociétales du territoire ? C'est le thème de cette réflexion commune lancée par l'UNSPIC et Villes de France.

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