Accélérer la transition vers un modèle de collecte des déchets plus vertueux : l’exemple du Grand Montauban

Un contrat exemplaire qui permet de passer d’une logique dans laquelle le prestataire de service s’engage sur des moyens (nombre de tournées, de bacs distribués, de véhicules, la fréquence de passage, etc.) à une logique de performance qui oblige l’opérateur à s’engager sur des résultats, qui conditionnent le niveau de sa rémunération.

Le Grand Montauban et SUEZ ont été les premiers en France à signer un Contrat de Performance Déchets Ménagers et Assimilés (CPDMA). Comment est né le projet et quels en sont les grands axes ?

Mathilde Ensergueix

Mathilde Ensergueix : Notre territoire est très engagé sur les sujets liés à la transition écologique, aux côtés de l’ADEME : nous avons un plan climat labellisé « Cit ‘ergie », nous sommes également un « territoire zéro déchet zéro gaspillage » depuis 2010. Le point de départ du projet a été la création d’une nouvelle déchetterie, dont nous avons voulu articuler l’exploitation avec celle de la recyclerie. Nous souhaitions que les acteurs du territoire soient impliqués dans le projet, d’où l’idée d’une gestion globale par un acteur spécialisé des déchets avec des sous-traitants locaux du monde de l’ESS. Cette réflexion a concordé avec l’appel à manifestation d’intérêt de l’ADEME sur le sujet.

 Jean-Michel Koua : Le Grand Montauban s’est donc fixé des objectifs ambitieux pour réduire fortement la quantité de déchets collectés sur son territoire. Quatre grands flux ont ainsi été identifiés, avec des objectifs de réduction précis pour chacun sur la durée du marché (2022-2028). Ce sont les tonnages de 2018 qui servent de référence.

  • Ordures ménagères : -12%
  • Tri sélectif : -2%
  • Déchets verts : -15%
  • Encombrants : -35%

C’est une révolution dans la manière de penser le service de collecte des déchets. L’opérateur est évalué sur la baisse des tonnages. Pour cela, le marché prévoit également une mission de prévention-communication auprès des usagers.

Comment se prépare un projet comme celui-ci ? En quoi la procédure de dialogue compétitif est-elle vertueuse pour un projet comme celui-ci ?

Mathilde Ensergueix : Nous avons mené une réflexion longtemps en amont. L’appel à projet de l’ADEME est paru en 2019 pour un marché qui a démarré en 2022. Notre atout résidait dans un état des lieux complet de notre service déchets, réalisé dans le cadre du dispositif « zéro déchet zéro gaspillage ». Nous avions une idée précise du potentiel de réduction des déchets dans notre collectivité. Le dialogue compétitif a permis de fixer les ambitions tout en laissant aux candidats la possibilité de faire une offre sur mesure. Ce qui nous a intéressé dans l’offre de Suez, c’est la multitude de services proposés pour accompagner les usagers vers la réduction des déchets, vers des nouvelles pratiques, et l’offre sectorisée par profil d’habitat.

Jean-Michel Koua : Le dialogue compétitif permet d’affiner le projet pour que la collectivité puisse obtenir le meilleur service au meilleur rapport qualité-prix. Cette procédure permet de co-construire une véritable solution sur-mesure. Cette procédure a un coût, mais la collectivité du Grand Montauban a été accompagné financièrement par l’ADEME. Coté opérateur aussi ; la réponse au projet a mobilisé des collaborateurs chez Suez pendant un an. Néanmoins cette procédure nous permet de proposer le meilleur de notre savoir-faire et de nos innovations aux clients.

En quoi est ce un contrat de performance et en quoi y a-t-il une rupture avec le modèle classique de gestion des déchets en France ?

Jean-Michel KOUA

Jean-Michel Koua: Ce modèle bouleverse nos business models, notre rémunération provient désormais de la performance. Si on atteint nos objectifs, nous percevons un bonus qui peut aller jusqu’à 10% de la rémunération annuelle. Le contrat mise sur la prévention via la communication aux usagers. Sur ce volet communication, on a mis en place un site internet « mon service déchet » sur lequel nous faisons de l’information et de la pédagogie, et sur lequel la collectivité nous aide à communiquer.   Une enquête a également été mise en place sur le recensement des bacs, et nous avons badgé les bacs. Grâce à ces informations, nous faisons de la prévention ciblée par quartier.

En quoi ce projet permet il de travailler avec les acteurs du territoire ?

Mathilde Ensergueix : Nous avons été accompagné par un bureau d’étude généraliste et un bureau d’étude spécialisé dans l’économie de la fonctionnalité. Nous avons ainsi listé les acteurs de l’ESS présents sur le territoire et diffusé cette liste aux candidats, afin qu’ils les sollicitent pour les intégrer dans leur offre. Un des critères de jugement portait sur le nombre d’emplois créés dans l’ESS.

Jean-Michel Koua : Nous travaillons avec beaucoup d’acteurs sur le territoire : nous avons 44 salariés suez et 45 salariés en insertion sur ce marché. Avec ce marché d’une durée relativement longue, nous avons souhaité multiplier les collaborations avec les acteurs du territoire. Ainsi nous sous-traitons la collecte des encombrants et dépôts sauvages à une association Régie de quartier « Montauban services ». Nous travaillons aussi dans les déchèteries avec Emmaüs et l’association IDDEES, une structure d’utilité sociale qui permet l’insertion d’un public en difficultés sociales. Avec l’ESAT Opteo, nous faisons du livrage de composteur à domicile, avec un volet formation de l’usager.

Les résultats à N+1 sont-ils à la hauteur des attentes ? quels conseils donneriez vous à une collectivité qui souhaiterait se lancer dans la démarche ?

Jean-Michel Koua : 11 mois après le début du Contrat de Performance Déchets Ménagers et Assimilés initié en janvier 2022, les actions déployées ont d’ores et déjà porté leurs fruits. Nous avons atteint les l’objectifs de réductions prévues pour la première année.

Mathilde Ensergueix : Les premiers résultats sont très encourageants. Il va falloir maintenir l’effort dans la durée.   Mes conseils pour se lancer dans un projet de cette envergure : se préparer à l’avance, faire du sourcing, avoir un bon état des lieux de son service, et être patient. Ce type de démarche prend beaucoup de temps et mobilise beaucoup de ressources en interne.

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