3 questions à Olivier GRUNBERG, Président de l’UNSPIC

« La gestion déléguée s’est adaptée au fil du temps pour permettre aux opérateurs privés de mieux répondre aux exigences de transparence et de performance attendues d’un service public, et donner ainsi toutes les clés aux élus pour piloter leurs services publics »

Vous venez d’être réélu pour un mandat de trois ans à la présidence de l’UNSPIC. Pourriez-vous dire quelques mots sur ses enjeux et vos objectifs ? 

L’Union Nationale des Services Publics Industriels et Commerciaux a été créée en 1985 pour promouvoir et défendre le rôle des opérateurs privés dans la gestion des services publics qui leur sont délégués. Une première remarque : le service public ne se délègue pas … C’est bien sa gestion qui se délègue ! Et c’est de cela que découle une bonne partie des propositions que nous faisons.

La délégation de services publics, ou la concession, née en France sous le second empire, est un mode de gestion des services publics qui associe une collectivité publique qui conserve toujours la définition, la maîtrise et le contrôle du service public, et une entreprise privée qui propose les moyens techniques, professionnels et financiers pour atteindre la performance attendue du service public. Cette dernière se rémunère par l’exploitation du service et en supporte les risques.

La gestion déléguée concerne quasiment tous les secteurs de la vie quotidienne des Français. L’UNSPIC rassemble ainsi des acteurs privés opérant dans de nombreux domaines : réseaux de chaleur, dépollution et traitement des déchets, gestion de l’eau et assainissement, restauration collective, infrastructures de transports et d’équipements publics, autoroutes, équipements de loisirs, transport public de voyageurs …

Nous défendons ainsi ce modèle de partenariat « gagnant-gagnant » à la française, qui permet à nos services publics de bénéficier du meilleur des deux mondes, au bénéfice des usagers-citoyens-consommateurs-contribuables.

Notre objectif est également de valoriser les savoir-faire de nos entreprises.  Celles-ci disposent d’une expertise en pointe sur leur secteur d’activités. Elles investissent massivement dans des domaines pour lesquels il n’existe parfois pas de recherche publique. Elles développent sans cesse de nouvelles innovations technologiques, sociales, environnementales et financières qui bénéficient aux territoires dans lesquels elles exercent leurs activités.

De nombreux opérateurs privés de service public français sont devenus des leaders mondiaux. C’est le cas de Vinci Concessions, Sodexo, mais encore Transdev ou Keolis. Dans le secteur des services à l’environnement, Veolia et Suez sont n°1 et 2 mondiaux, un fait suffisamment rare pour être souligné. Toutes ces entreprises font rayonner le savoir-faire français à l’international.Le gouvernement s’est engagé à réduire de 3 points la dépense publique d’ici à 2022, tout en maintenant un haut niveau de qualité dans les services publics. Le défi est d’autant plus ambitieux que les leviers à disposition ne sont pas très nombreux.

En quoi la délégation de service public peut –elle constituer une des réponses à ces enjeux ?

En France, aujourd’hui, toutes nos collectivités publiques – Etat, régions, départements, communes et intercommunalités – sont mises à contribution pour tenter d’atteindre cet objectif de réduction de la dépense publique. Elles sont confrontées à des objectifs très ambitieux sans précédent pour leurs finances.

Au niveau local par exemple, après des années de baisse des dotations aux collectivités, le gouvernement actuel a opté pour une nouvelle méthode, la contractualisation financière. Ce dispositif vise à encadrer l’évolution des dépenses de fonctionnement et la dette des plus grandes collectivités territoriales. Cette démarche va inciter les élus locaux à s’interroger sur la manière d’optimiser la gestion de leurs services publics pour obtenir le meilleur rapport qualité/prix.

Dans ce contexte de recherche de performance, la délégation de services publics à des opérateurs privés présente de nombreux atouts.

Le contrat passé entre l’entreprise et la collectivité est avant tout un contrat d’objectifs, gage de transparence et d’efficacité. La performance est mesurée à travers des indicateurs objectivés mis en place par secteur, qui visent à apprécier la qualité des services publics. Ce sont de véritables outils de progrès, de comparaison ainsi que de communication interne et externe pour les collectivités.

La remise en jeu du contrat à échéance régulière, et la concurrence accrue avec d’autres opérateurs poussent chaque entreprise à proposer le meilleur service au meilleur coût. L’opérateur est par ailleurs de plus en plus souvent intéressé à la performance. Il assume le risque d’exploitation ; il assure le service et choisit ses moyens notamment en personnel pour que le service public fonctionne durablement en apportant les meilleures obligations de qualité. Des pénalités peuvent être attribuées en cas de non atteinte des objectifs de performance.

 Ce mode de gestion permet de préserver la capacité d’autofinancement de la collectivité, qui fait ainsi reposer sur son opérateur le risque d’exploitation, mais parfois aussi les investissements, les travaux de rénovation et de mise aux normes selon la nature du contrat.

Enfin, les opérateurs effectuent en permanence des benchmarks. Ils comparent leurs propres prestations entre elles (entre filiales, sites, services…), mais aussi à celles proposées par leurs concurrents. Le benchmark est un processus continu d’analyse comparative, d’adaptation et d’implantation des meilleures pratiques.

J’ajouterai que nos entreprises déploient également des moyens importants pour former les personnels, développer leurs compétences sur des métiers qui évoluent très vite. Ainsi, elles disposent des savoir-faire dans des métiers complexes et une capacité à intégrer rapidement les nouvelles contraintes techniques et réglementaires.

Tout cela concourt à proposer un service de grande qualité au meilleur coût.

Quel est le rôle de l’autorité organisatrice dans la gestion déléguée ? Dans un contexte de finances publiques contraintes, et dans le cas d’une délégation d’un service public à un opérateur privé, et notamment quand il s’agit d’un grand groupe, le Politique a-t-il encore une marge de manœuvre suffisante pour piloter son service ?

Plus que jamais ! La gestion déléguée s’est adaptée au fil du temps pour permettre aux opérateurs privés de mieux répondre aux exigences de transparence et de performance attendues d’un service public, et donner ainsi toutes les clés aux élus pour piloter leurs services.

La transparence est vraiment devenue un point fort de ce mode de gestion.Les opérateurs sont soumis à de nombreuses obligations de reporting : modèles financiers annexés, rapport du délégataire… tous ces outils permettent aux élus de mieux appréhender l’économie du contrat et les enjeux du service

L’existence d’un contrat fixé entre la collectivité et l’opérateur privé permet de préciser le rôle de chacun. Celui de la collectivité est bien celui d’un maitre d’ouvrage. Elle définit les missions de service public, fixe les objectifs, contrôle l’effectivité du service rendu, dans le cadre du contrat passé avec le partenaire privé.  Elle s’assure de la qualité du service, ainsi que de l’équilibre financier du contrat. Au final ce sont bien les élus qui fixent le prix du tarif et le niveau de performance attendu. Ils restent maitres des objectifs et des priorités en matière de services rendus aux usagers – clients.

Il n’y a pas de bon partenariat si la gouvernance publique n’est pas forte</strong> : pilotage politique fort, identification précise des besoins du service, accompagnement par un conseil de qualité, gouvernance claire pour le suivi technique et financier, contrôle tout au long de la vie du contrat…

Aujourd’hui, nos collectivités ont les moyens de se doter des compétences pour négocier les contrats avec les opérateurs privés ; soit par le renforcement des compétences internes (rendu possible notamment par le mouvement général de regroupement des compétences ) soit par l’accompagnement par une expertise externe, sous réserve qu’elle soit compétence et qualifiée. La formation et la qualification des assistants à maitrise d’ouvrage qui accompagnent les collectivités dans leurs réflexions sont des enjeux clés pour des partenariats de qualité.

Ainsi, la délégation de service public est un vrai partenariat équilibré. On est d’ailleurs de plus en plus souvent dans une démarche de co-construction du projet entre les partenaires, comme le montrent les exemples de contrats qui illustrent notre newsletter. Par la richesse des regards croisés entre secteur public et privé, les exemples de terrain témoignent de la force de l’intelligence collective comme levier de performance de services publics.

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